Je ne suis pas contre un peu de contexte. Mais parfois, il y a trop d’informations. Bien trop. Je pose un regard sur le dossiers. C’est trop. Suis-je le seul que ça gêne. Cette marrée de preuves pouvaient être bien pratiques. Trop pour avoir une piste valable, assez pour partir dans tous les sens. C’était tout sauf agréable. Vraiment le pire des scénarios possible. Je passe ma main sur mon visage. J’entends le rire du spectre qui me suit. Il s’amuse au moins lui. Bon, c’est à mes dépends. Au moins il s’ennuie pas. Il n’est pas en train de se prendre la tête pour des détails.

Je pose un regard ailleurs, ces photos vont me rendre chèvre. Bon je ne vais pas me transformer en caprin, mais quand même. Le fait était que j’allais partir dans pleins de chemin et pendant ce temps, le gars pourrait continuer ses crimes ou vivre une vie un peu près normale.

Je finissais par me lever. Un café, ça me fera du bien. Bon, je suis plus thé que café. Mais j’avais besoin d’autre chose. De ce petit truc que donnait la caféine. Je savais que la machine servait du café presque imbuvable. À peine comestible. Si bien que j’hésitais avant de faire glisser une pièce dans la fente prévue à cet effet.

Mais je me lance. Un soupir s’échappant de mes lèvres. Que quelqu’un me sauve de cette infamie. Je l’entends ce ronronnement si particulier, celui que fait ce genre de machine. Un bruit que certains pense agréable, moi, j’ai envie de fuir et loin. Pourtant le liquide coule dans un gobelet en plastique. Bien prendre par le dessus. Pas se brûler. Oui, ici, c’était bouillant ou rien. Te brûler les lèvres, c’était presque risible, pour juste boire une boisson chaude. Mon royaume pour un mélange anglais.

La voix d’Hakuba perçait le silence presque pesant du commissariat. Je ne sais pas si je dois le remercier ou non. En tout cas, cet homme amuse mon squatteur. Il rit souvent en disant à quel point ce gars ressemblait bien plus à un héros que lui-même. Il n’avait pas tout à fait tord. C’était à son tour d’être saluer par ce rayon de soleil. Il souleva un sourcil.

« Une moue triste, moi ? Ah désolé, Hao-san. Bonjour. J’étais sur un dossier et je réfléchissais à comment défaire le sac de nœud que c’est devenu. Je ne suis pas triste. J’ai envie d’une boisson plus décente, c’est tout. Mais je ne suis pas là pour discuter du café, il est utile et indispensable. Tu es en forme par contre. Ça fait plaisir de te voir comme ça, cher collègue. »

Je prenais d’un geste lent et ample le gobelet. Tenant du bout des doigts le dessus. La fumée chauffant ma paume. Les saunas de par mon pays natal sont plus féroces qu’une petite tasse de café contenue dans un gobelet fabriqué à la chaîne.

« Je ne te propose pas un café, mais je pense que tu pourrai jeter un œil sur le dossier. Je suis tellement plongé dedans, j’ai dû rater des détails. »

Je pouvais entendre mon papy me dire qu’en effet, j’avais raté l’essentiel. Je faisais mine de l’ignorer. Il m’avait collé toute une partie de ma vie. J’espère qu’un jour, il sera paré à partir.

« Enfin, le temps n’est pas aussi pressé que ça. Prends le temps de te mettre à l’aise. »

L’urgence était que je puisse voir si ces indices étaient concordant avec les témoignages de curieux, trop heureux de dénoncer les gens qu’ils ne connaissaient que peu ou ceux dont ils avaient une animosité.

Je lui souris doucement, j’ignore le rire de mon squatteur. Du fantôme qui me suit partout. J’ai l’habitude de l’entendre dire des choses en suédois. Je ne risque pas d’oublier d’où je viens avec quelqu’un comme lui à mes côtés. Je tasse le dossier d’un geste habitué. Je lui tend avec la même expression sur le visage. Alors que le café m’arrache une énième grimace. Moi qui ne laisse que peu filtrer mes émotions. Je crois que cette boisson diabolique me fat sortir de ma réserve.

« Merci de jeter un œil. Je ne vais pas te mentir Hao-san. Je ne l’aime pas. Ce café ne mérite pas le nom qu’il porte. Une journée paperasse ? Voilà une chouette idée. Tu me dis si tu as besoin de moi. Je suis sûr qu’à deux, on peut avancer. »

Je pense quand même à finir ma boisson venant tout droit des limbes des enfers. Même dans les pires endroit d’Yggdrasil, je pense pas qu’ils ont ce genre de boisson. Et bon sang certains endroits de la mythologie nordique sont glauques au possible. Je jette mon gobelet d’un geste ample.

Qui disait petite ville, disait un nombre de dossier trop longtemps oublié. Mais pas forcément moins de dossiers. La taille de la ville n’a aucune importance, il y a toujours des conflits internes entre civils, sans parler de la mafia. Pas les yakuzas. La mafia qui semblait être là sans pour autant vouloir en dire plus. C’était rageant. Complètement rageant. Ces accidents en série était lié à tout ça ? Je l’ignorai. Je devais juste voir ce que verrai mon collègue.


« Hao-san, ne vous forcer pas trop. »

Je n’ai pas envie de le voir mal à cause de quelque chose. La ville a besoin de nous. De nous tous au meilleur de notre forme. Il y avait de tout dans le dossier, c’était ça le nœud du problème, preuves à foison, témoignages et beaucoup d’hypothèses dans ma tête.

J’avais presque oublié l’énergie contagieuse de cet homme. Contagieuse, car je sais qu’elle m’entraîne malgré moi pour aller de l’avant. Je ris doucement face à sa réponse. Classique, presque prévisible. Pourtant elle me fait plaisir. Voir quelqu’un de si appliqué est toujours agréable. Il sait sûrement des choses que j’ignore. Après tout, il est là depuis bien plus longtemps que moi.

« Dans ce cas, nous mettrons en commun nos hypothèses à la fin de ta lecture. J’aimerai avoir votre avis sur toute cette histoire. Moi, je crois qu’il y a anguille sous roche. »

Je n’en dis pas plus. Je veux en aucun cas l’influencer. Je garde pour moi que tout dans cette ville semble tourner d’un même sujet. Un sujet qui semblait si dangereux que le frôler risquait de tout faire exploser. Il faut savoir creuser sans rien provoquer qui risquait de tout déclencher. Certains me diront que je me mouille pas. Peut-être. Mais quand quelque chose est grand, il faut savoir diviser pour mieux régner. Prendre doucement du terrain sans que les personnes s’en aperçoivent. Je sais parfois, je pense comme mon frère jumeau. Mais moi, je respecte la loi.

« Vous devriez vous mettre sur une chaise Hao-san. »

Ce genre de choses faisait aussi partie de mon métier. Prendre soin de mes concitoyens. Même si ce dernier était un collègue. Le dossier est assez épais l’air de rien. Je sais que beaucoup de choses semblent contradictoire. Et c’est ça qui m’inquiète. Peut-être que cette affaire était lié à une autre pas encore commencée. Et là on entrerait dans un engrenage sûrement bien plus grand. Je me sens paré et un peu effrayé. Cependant, je ne vais pas reculer, car cet endroit avait besoin de nous. Donc de moi aussi. Qu’importe si je suis pas aussi solaire que mon collègue. Je ferai de mon mieux.

Je haussais un sourcil, il s’inquiétait vraiment du café à cause de ma remarque. Avec toute sa motivation, il expose son implication plus que claire dans la ville. Je suis bien plus discret que lui. Mais j’aime donner de mon temps aux personnes dans le besoin.

« Vous avez une bonne affinité avec ce genre de public. Ils vont finir par vouloir vous mettre en couple avec leurs enfants. »

Les personnes âgés sont de sacrés marieur une fois lancé. En tout cas, en Suède, ils le faisaient quand bien on insistait pour refuser ces demande de fiançailles des plus sauvage. À défaut d’un mot plus adapté pour ce genre de demande soudaine.

« Ils semblent être plutôt gentils. Puis je suis pour le développement de la ville et de ces acteurs directs. Y compris les commerce tenus par les citoyens. Surtout eux. »

Je rends le téléphone à mon collègue. Pas besoin de m’attarder plus sur ce couple qui semblait vouloir occuper leur vieux jours de clients en tout genre. Je venais prendre un stylo bille pour noter le nom. Il aimait le bon café. Si celui-ci était aussi bon que le targue son collègue, je commanderai chez eux. Mon vieux suédois m’avait laissé aujourd’hui ce qui laissait la place l’horloge du poste occupé l’espace sonore avec le bruit des feuilles qu’on tournait sans cesse.

Ce dossier avait de gros soucis, je le savais bien. Pour cause, j’avais repris l’affaire en cours. Me laissant avec des notes sans queue ni tête. Juste trop de choses. Beaucoup trop comme si on avait voulu noyer le poisson. Un poisson bien trop gros pour le cacher par de simples algues. Et je mettrait ma main à couper qu’un réseau criminel était derrière tout ça. Et si ce rapport était celui d’un traître. D’un infiltré ? Tout était possible. Je le regardais, attendant un mot de lui.

De simples mots pouvaient faire mal, je le voyais dans le regard de mon collègue. Les histoires d’amour de cet homme étaient donc douloureuses. Je notais dans un coin de mon esprit de pas trop en parler. Un deuil, je regardais derrière son épaule. Certains esprits se raccrochait à la vie. Mais pas de femme derrière le dos de son collègue.

Puis pour désamorcer le silence, il pointa le doigt sur un nom. Il souleva un sourcil. Nayaka, ça lui disait quelque chose. Une écriture de femme.

« Je n’en ai pas vu personnellement, à moins que je ne le sache pas. Mais si j’en crois ce que j’entends, ils sont pas mal nombreux. Soit une collègue, soit un témoin qui nous a laissé un témoignage écris. »

Après tout si ces derniers étaient nombreux. Je ne serai pas surpris d’en trouver partout. Même en Suède. Qui sait. Je me grattais le menton en posant le dossier. Il devait avoir un Nayaka quelque part. Rien pour le moment. Mais il ne pouvait pas laisser ce mystère sans être résolu un jour. Il passa une main dans ses cheveux blonds.

« Je suis sûr de l’avoir vu autre part. Pas toi ? »

Je fis les cent pas. Réfléchissant en même temps. Je ne devais pas abandonné juste parce que là, il y avait rien. Absolument rien. Sauf ce nom dans ce dossier. Pire que pire des spectre à mes yeux. Où était ces squatteurs quand on avait besoin d’eux ? J'ai entendu l’aboiement d’un chien. Pas de chien dans les environs. Peut-être un chien policier fantôme. Euh ? Il y avait une brigade canine dans cette petite ville ? Ça se voyait plus dans des grands postes… Je soulevais un sourcil.

« Tu as entendu ? »

Qui sait, peut-être que le chien était vivant, juste proche.

Un mince sourire désolé se peignit sur mon visage. Un peu mal pour lui de le voir noter ces noms qui ne semblait pas se stopper avant au moins une bonne page. Et je suis certain que j’exagère à peine. Je me grattait le cou. Donc, ce chien était pas là. Il était là juste pour ceux qui comme moi pouvait voir et entendre quelque chose. Mais l’inquiétude de mon collègue me fit sourire un instant.

« Vers la sortie, je pense que c’est peut-être moi. Je me suis trop plongé dans les dossiers. Et mon cerveau ne fonctionne plus correctement. »

Je m’incline légèrement. Ce chien aboie de plus en plus. Sans discontinuer. Je vais vers le bruit. Je me retrouve proche de la sortie. La ville bouge sous mes yeux. Les citoyens me salue parfois. Mais je sais que j’ai une tête d’étranger. Certains sont méfiant. Le chien a cessé de faire du bruit. Il n’y avait pas un chien. Des oiseaux perché sur le fil électrique. Mais pas l’ombre d’un canidé. Comment allais-je expliquer ça à Hao-san ? Le coup du surmenage ne fonctionnerait pas éternellement. Je mordis mes lèvres. Je suis mis dans ce problème tout seul. Tout seul. Je revins vers lui.

« Désolé, je pense qu’avec ces noms déjà on peut partir sur une piste Hao-san. Je vous jure que je me reposerait une fois chez moi. Ne vous en faites pas pour moi. »

Je lui fit un sourire doux. Mais je n’étais jamais vraiment seul, certains esprit réclamait vengeance, hurlant le nom de leur meurtrier. Même avec cette preuve, je ne pouvais rien faire de plus. Et mentir en parlant de témoignage, ce n’était pas très correct. C’était peut-être ça qui avait rendu fou mon jumeau.

« A moins que tu vois autre chose ? Je suis plus que partant pour tes idées. »

Je dois bouger, je dois savoir le fin mot de l’histoire.  

Je glissais sur le bureau le bon à bonbons. Il y en avait toujours pour se rassurer, pour rassurer aussi les victimes qui vennaient ici pour voir quelqu’un pouvant les aider. La loi avait ses limites, je ne pouvais pas partir de rien. Même avec les fantômes comme alliés. Prenant le dossier d’une main, je le regardais un peu mieux. Avant de laisser échapper un léger rire, aérien, cristallin. Rares étaient les moments où ils laissaient ses émotions trop filtrer.

« Allons sur ça, même si ça nous prends des heures. Pour les affaires liés, je pense que nous en avons quelques unes. Parce que ma mémoire me dit que j’en ai déjà entendu parler ou lu. »

En voyant son sourire lumineux, je me laisse influencer malgré moi. Je lui retourne un sourire sûrement maladroit. Ce qui fit bien rire sûrement un esprit qui traînait par là.

« Merci Hao-san, si tu as besoin d’un coup de main, n’hésite pas. Après tout, c’est un peu ma faute si tu te retrouves embarqué la dedans. »

Je ne voulais pas qu’il fasse trop. Même je sais que ça finira par arriver. Car je suis un peu comme ça. Je ne comptais plus les heures passées sur ce dossier. Je me mettais à fouiller l’annuaire. Le nom était pas si nombreux. Peut-être dans un autre. Peut-être que j’avais dans les mains un bottin un peu daté. Ou qu’ils étaient pas le genre à avoir une téléphone fixe. Je pense que je vais pencher de plus en plus pour la seconde option. Mais je pris soin de noter les quelques noms qui m’était venus dans cette recherche. Je me levais pour aller dans les dossiers de la ville, cherchant bien à la lettre N. Je pensais les dossiers assez épais, mais celui-là, il dépassait mes attentes. J’en avais pour des jours