Ton chauffeur à tes côtés, tu fixes l’énorme porte japonaise de tes yeux bleu-gris. Quand tu as appris que la jeune Miharu habitait le quartier traditionnel de Namimori, et qu’elle est potentiellement liée à la mafia, tu imaginais qu’elle aurait une demeure avec un minimum de cachet. Mais tu étais loin de t’attendre à une telle résidence. Tu ne peux que saluer le style traditionnel. C’est magnifique. Et très différent de ce à quoi tu es habituée.

La raison pour laquelle tu es là est très simple. Tu dois t’assurer que le festival se déroulera pour le mieux. Et Yuri étant la responsable d’une des activités principales, à savoir la course arc-en-ciel entre les stands (dieu, que l’idée te paraissait stupide) tu te dois de voir avec elle les mesures de sécurité qu’elle a prise. Quand tu lui en as parlé, quelques jours avant, elle t’a proposé de venir chez elle pour te montrer ce sur quoi elle a travaillé.

Te voilà donc, attendant que l’on vienne te chercher. Honnêtement, tu ne sais pas à quoi t’attendre. Tu imagines les plans toujours plus extravagants qu’a pu mettre en place la demoiselle. Franchement. Une course arc-en-ciel. ENTRE les stands. Mais qu’est-ce que Rihan a fichu pendant les réunions avec les élèves ? Tu ranges une mèche derrière ton oreille, prenant soin de ne pas défaire ton chignon effet décoiffé. Un soupir menace de franchir tes lèvres, mais tu te contentes de prendre une grande inspiration. Tu sens que ce chantier-là va être plus ardu que les autres. Incapable de l’annuler, tu vas devoir rédoubler d’efforts pour faire en sorte qu’il ait lieu. Et qu’il ait lieu dans les conditions optimales.

Tu en as déjà mal à la tête rien que d’y penser.

Les portes s’ouvrent. Tes lèvres esquissent ton habituel sourire. Très cordial. Très discret. Tu te prépares mentalement à régler un énième casse-tête.

Dès lors que tu la vois, tu fais un signe à William qu’il peut retourner à la voiture. C’est une habitude qu’il a, de t’accompagner jusqu’à la porte des inconnus. Une simple formalité, pour s’assurer qu’il ne t’arrive rien entre le moment où tu sors de la voiture, et celui où tu arrives à destination.

Il n’a jamais été de grande conversation. Honnêtement, c’est même le genre à se faire oublier. Mais ça te convient. Quand tu rentres chez toi, après une longue journée, tu n’as certainement pas envie de sociabiliser avec quelqu'un. Tu ne sais rien de lui. Il ne sait rien de toi, rien d’intime en tout cas. Et ça te convient. C’est comme ça avec tous tes domestiques, et c’est parfait.

William s’en va donc, et toi, tu maintiens ton petit sourire. Diable, elle irradie de bonheur. Tu avais presque oublié. Comment fait-elle pour avoir autant d’énergie au quotidien, bon sang ? Toi, tu as déjà envie de rentrer. Tu t’inclines avec gracieuseté. Le geste est japonais, mais le style est princier.

-Bonjour, Miharu-chan.

Il te semble qu’elle t’a déjà demandé de l’appeler Yuri, la dernière fois, mais qu’importe. La politesse, c’est bien. Ça permet de garder les autres à distance.
Tu n’es pas vraiment emballée à l’idée de faire un thé, donc tu réponds :

-Avec grand plaisir. On en discutera devant une tasse.

Beh oui. Même si ça te fait chier, il faut bien que tu maintiennes un minimum de politesse. Tu te dis qu’au pire, ça servira de prémisse pour commencer à en discuter avec elle. Tu laisses tes chaussures à l’entrée, comme tu as appris à le faire, et t’assoit gracieusement sur le coussin à la japonaise. Tu sais, comme une princesse le ferait. C’est à ce moment, généralement, que tu lèves délicatement la main pour voir des oiseaux s’y poser, tandis que quelques notes aiguës et harmonieuses franchissent tes lèvres.

Tu pourrais chanter bien sûr, tu astous les attributs d’une princesse Disney et ta voix en fait partie. Mais ce n’est clairement pas le moment, alors tu te contentes patiemment d’attendre que ton hôte arrive. Tu en profites pour scruter la pièce, ainsi que tous ses détails. C’est très apaisant. Tu ne t’attendais pas à voir Miharu-chan vivre dans une telle demeure.

Dès lors que cette dernière est assise et commence à vous servir, tu places tes mains autour de ta tasse, souffles délicatement dessus pour en perturber la vapeur, et entres dans le vif du sujet.

-Comme tu le sais, je suis venue pour discuter de la course arc-en-ciel. Où en es-tu des préparatifs ?

Sous tes yeux qui se plissent de plus en plus, tu vois arriver au fur et à mesure des plats en tous genre. What…. Est-ce qu’elle avait prévu que tu manges avec elle ? Une quantité aussi énorme ? Tu as presque envie d’en rire tellement c’est aberrant. Elle n’a pas bien l’air d’avoir compris que tu comptes t’en aller dès lors que tu auras fait ton travail. Ton cuisinier a déjà prévu de te servir pour ce midi. Et puis, tu as un régime alimentaire particulier, de toute manière. Dommage, tant d'efforts pour rien, quel gâchis.

Par contre, quand elle te montre « tous les dossiers de la course » tes yeux finissent comme des soucoupes sans que tu ne le veuilles. En fait… Cette fille est constamment dans l’excès, ou comment ça se passe ? Tu sais que ce genre d’évènement nécessite une grosse charge de travail. Mais autant ? Tu exiges du zèle de la part de tous ceux qui t’entourent. En revanche, tu as un peu plus de mal avec le travail qui n’est pas efficace. Qu'elle ait fait de son mieux ou pas, peu importe le nombre de dossiers, si cette fille n’a pas fait son travail correctement, elle va t’entendre. Parce que moins d’un mois pour organiser une course de A à Z, ça va te couter foutrement cher et tu n’as pas envie de ça.

-Je pense que je vais voir d’abord les explications, déclares-tu d’un ton neutre.

Histoire de voir si tu as besoin de perdre ton temps à éplucher cette pile immonde de dossier.

-J’ai besoin de voir en priorité la logistique mise en place : matériel, coût, main-d'œuvre et mesures de sécurité. J’insiste sur le dernier point.

Tu sens que ta tasse a un peu refroidi, alors tu la portes à tes lèvres. Le thé qu’elle contient est à l'image de la maison dans laquelle vous vous trouvez. Traditionnel. Zen. En tout cas, c’est l’impression que te donne ce genre de décoration à chaque fois que tu en vois une. Calmement, tes yeux se posent de nouveau sur la nourriture.

-... Est-ce que d’autres personnes sont censées venir ?

Tu sors un stylo de ton sac, et le fais tournoyer rapidement entre tes doigts. Puis tu en dépose la mine sur le carnet que tu tenais entre tes mains. Tu ouvres grand tes oreilles, prête à ne pas perdre une miette de ce qu’elle va te dire.
Elle parle.
Tu notes.
Tu organises le tout en listes, surligne si besoin.
Elle parle encore.
Tu notes.
Elle parle.
…
Elle parle.
…
Elle continue de parler.

A mesure que tu écoutes, tu écris de moins en moins, alors que tes yeux, eux s’écarquillent de plus en plus. Mentalement, tu coches chacun des items de ta foutue liste, celle que tu as toujours en tête durant l’organisation d’évènements.
Horaire et durée ? Check. Main-d'œuvre ? Check. Normes de sécurité ? Check. Déroulement ? Check. Matériel ? Check.
God, elle a même pensé à des détails divertissants, la décoration et les sponsors.

Eh ouais, la grande Eden McCampbell est bouché bée.
Ce n’est même pas qu’elle a pensé à tout. C’est qu’elle a pensé à tout intelligemment.

Et par-dessus le marché, elle a fait tous ces plats elle-même pour toi. Tu n’apprécies toujours pas le gâchis, mais vu tout ce qu’elle a balancé juste avant, tu t’en cognes, en fait.

-Uuuuuuuuuuh...

Tu regardes le résumé, puis regardes ton carnet, puis regarde le résumé de nouveau.
T’es tellement sur le cul que tu n’as rien à dire.
…
C’est une bonne chose, non ? Ça veut dire que c’est un problème en moins, non ?
…
Avoue, au fond ça te fait chier un peu, quand même.

Tu fixes de nouveau tes notes, qui ne ressemblent plus à grand-chose. Tu secoues brièvement la tête pour te reprendre, ferme enfin ta jolie bouche et parcours le résumé. Il y avait des points sur lesquels tu voulais revenir, de toute manière.

-C’est… Un travail correct.

Venant de toi, ça veut dire beaucoup.

-Le concert dure une heure, non ? Ce sera suffisant pour tout mettre en place ? Cela va vouloir dire qu’il faudra fermer l’accès au stand pendant ce laps de temps. Pour ça, le concert tombe très bien. De plus, beaucoup de personnes vont-être impliquées dans la mise en place de la course. Il va donc falloir les coordonner efficacement. Ça va nécessiter des gens informés des procédures pour superviser le tout, mais également un moyen de transmettre efficacement le travail que chacun aura à faire, et comment il devra le faire. On va devoir être très rigoureux là-dessus, car nous n’aurons pas le droit à l’erreur.

Fais gaffe, Eden. T’as dit « Nous » là.

Pfff, bien sûr, que tu vas t’occuper de l’organisation. C’était sous-entendu dans ton discours, et tu n’avais clairement pas besoin de l’approbation de cette demoiselle pour t’en mêler.
N’empêche, même si ça t’emmerde, une partie de toi est soulagée.

Les jambes croisées, avec ton air toujours intransigeant, tu l'écoutes. Et tu te rends compte que ça te touche beaucoup plus que tu aimerais bien le croire, de voir qu’elle a pensé à toi, même si tu n’étais plus là. Mpfff OF COURSE qu’elle y avait pensé. Tu es le meilleur élément de ce lycée. Mais tu salues sa prévoyance quant à la possibilité que tu ne reviennes pas. Définitivement, cette première année est efficace.

Forte de cette pensée, tu es prise d’une réalisation.
Est-ce pour ça que Rihan a accepté cette maudite course ?

Tch. Certainement pas. Il n’y avait aucun moyen qu’il le sache.

Mais quand même, cette pensée te donne envie de casser des meubles.

Cette demoiselle te fait sa proposition officielle quand un mouvement attire tes yeux bleus gris et déterminés. Ton visage reste neutre, mais la détermination de ton regard se décompose peu à peu, laissant place à de la surprise.

Lui ?!

Mais qu’est-ce qu’il fait-là ?!


-Bonjour de nouveau, Sora-san, réponds-tu d’un ton cordial en inclinant poliment la tête.

Une lueur rancunière passe dans tes yeux. S’il comptait passer, pourquoi ne t’a-t-il pas prévenu ?
Merde, tu ne sais pas quoi en penser. Tu connais suffisamment ton mentor pour savoir qu’il ne laisse rien au hasard. Alors pourquoi est-il ici ? Visiblement, il connaît la petite Yuri, mais est-elle au courant de son rôle dans la mafia ?

*C’est très probable* penses-tu sans aucune hésitation. Votre rencontre, peu avant que tu ne partes, semblait indiquer que la première année avait un lien avec la mafia. Un lien probablement important. Indépendamment de la course, n’était-ce pas un sujet que tu comptais aborder à un moment ou à un autre, en venant ici ? Après tout, ta mère t’a bien fait comprendre, récemment, que tu ne pouvais plus te permettre d’attendre.

Mais lui, que diable a-t-il en tête ? Encore une fois, tu te rends compte qu’il ne t’a pas tout dit, et ça t'énerve. Pourtant, tu restes parfaitement de marbre. Comme d’habitude, les variations de ton humeur sont bien cachées au plus profond de tes yeux. Un petit sourire poli étire tes lèvres.

-Miharu-chan et moi étions en train de discuter d’un événement de notre lycée.

Tes yeux se posent de nouveau sur la demoiselle aux cheveux blancs. Peut-être bien que Sora vient d’arriver, mais ça ne change rien à ce que tu es venue faire ici, et il y a des questions encore en suspens. Tant pis pour lui, il n’avait qu’à te prévenir de ses plans.

-A ce sujet, Miharu-chan, oui, je m’occuperais d’une partie de la gestion pendant la course. Comme je l'ai dit, c’est primordial que tout se déroule bien, et je compte bien tout mettre en œuvre pour que ce soit le cas. D’ailleurs, si vous manquez de ressources, la marque McCampbell peut apporter un soutien financier. À condition qu’elle soit affichée parmi les sponsors, bien sûr.

Intégrer les McCampbell au fonctionnement de ce maudit lycée, c’était aussi l’occasion pour toi d’étendre ton influence, donc ce serait un investissement payant pour toi.
Tu te tournes enfin vers ton mentor, avec ce même sourire poli sur tes lèvres.

Même si tu es clairement pissed.

-Je ne m’attendais pas à vous revoir de sitôt, Sora-san. Et je ne pensais pas que vous connaissiez Miharu-chan. Qu’est-ce qui vous amène ?

(Trigger warning : le rp qui suit contient des pnj ayant des propos haineux pour la communauté lgbtqia+.)

Dire que moins de deux heures plus tôt, tu avais confronté l’arcobaleno sur son comportement vis-à-vis de toi et cette tendance qu’il avait de te cacher les choses.
Qu’il t’avait rassurée sur le fait qu’il te faisait confiance
Qu’il t’avait acceptée telle que tu étais.
Qu’il t’avait vu comme personne ne t’avait vue depuis bien longtemps.

Tout ça pour te refaire le même coup moins de deux heures après ?!
…
Seriously, Sora ?!!

Tu as un profond respect pour ton mentor, hein. Mais là, tu as respectueusement envie de l’étrangler.

Mais bon, sous peine de devoir t’exiler au Pérou pour élever des lamas, tu décides de ne pas le faire. A la place, tu continues de sourire, même si tu as une petite veine gonflée sur ta tempe gauche.

Heureusement, un mot capte ton attention et te ramène dans la conversation.

… Transition ?
Ton expression ne varie pas d’un cil, mais ton cerveau doit quand même tourner à plein régime pour comprendre le sens de cette phrase.
Tu n’es pas très au fait des questions lgbtwhatever+, et la raison est très simple. C’est pour ça que tu manges avec au moins trois paires de couverts différents lors du diner. La raison pour laquelle ta famille envisage le mariage arrangé avec beaucoup de sérieux, même s’ils n’ont pas encore trouvé le parfait prétendant. La raison pour laquelle tu ne peux pas admettre que tu lis des mangas et que tu joues aux jeux vidéos, de temps à autre. La raison aussi, pour laquelle tu n’as jamais pu ouvertement faire de la boxe thaï.

Parce que ta famille est indéniablement vieux jeu.

Toutes les familles aisées ne le sont pas forcément, mais la tienne l’est. Donc tout ce qui sort un peu de la norme est malsain.
Les homosexuels sont malsains. Les trans sont malsains. Les « queers » en générale sont comme leur nom l’indique. Des queers.

Toi ?
Toi tu t’en fous. Tu ne comprends pas pourquoi tes parents s’énervent sur des mouvements sociaux qui ne les impactent même pas. Tu ne comprends pas non plus cette communauté et ça te va très bien. Tu n’as pas le luxe de te renseigner sur tout ce que tu ne comprends pas si ça n’a pas un intérêt direct sur ta vie.

En revanche, quand ton mentor a soulevé la question de son genre lors d’une de vos discussions, c’est devenu ton intérêt d’en savoir un peu plus. Alors tu t’es renseignée. Et effectivement, tu as appris qu’il y a des gens qui changent de genre au cours de leur vie, et que c’est cela que l’on appelle une « transition »

… Est-ce que cela veut dire que Yuri n’était pas née femme ? A moins que les deux individus en face de toi parlent d’autre chose. Peut-être un terme spécifique à la mafia, mais tu ne vois pas ce que ça pourrait être d’autre, en dehors de ça.

Cette question mise de côté, tu es étonnée de constater que ce que dit cette fille te touche. Tu tiens Sora en haute estime, aussi irritant qu’il puisse être quand il joue le mentor mystérieux. Qu’on te dise qu’il est la seule personne capable de prendre en charge ton travail en ton absence, ça flatte ton égo comme pas permis.

La bombe que te lance ton maître, par contre, souffle toute trace de réflexion dans ton esprit. Ta bouche s'entrouvre légèrement, tandis que ta tête se tourne doucement vers la demoiselle aux cheveux blancs, la dévisageant de la tête aux pieds.

WHAT

THE FUCK ?!!

Tu te doutais que Yuri avait un pied dans la mafia, mais de là à être marraine d’une famille ?!
Tes yeux se posent de nouveau sur Sora et lui lancent des éclairs.
Et il sourit en plus !
Ce con sourit alors qu’il savait depuis le début !!!

A ce stade, tu te poses honnêtement la question : est-ce que ça ne vaut pas le coup de s'exiler au Pérou pour élever des lamas juste pour la satisfaction de l’étrangler ?

Tu écartes cette idée, car elle devient beaucoup trop tentante pour ton propre bien. A la place, tu tentes de digérer la nouvelle.
Tu as cru comprendre que la mafia recrute des lycéens mais tout de même ? Cette fille ?

Certes, elle t'a montré qu'elle pouvait agir intelligemment, avec le festival. Tu as même pu avoir un aperçu de son habileté au combat. Ceci étant dit, il y a un fossé entre ça, et être à la tête d’une puissante famille de mafieux ! On t’aurait dit que c’était Rihan, ou Aoi, ou même cet imbécile de Shin, à la rigueur, ça t’aurait moins choquée. Mais cette fille-là n’était-elle pas un peu trop... naïve pour ce genre de choses ?

Et pourtant, Sora semble lui faire confiance.

Tu plisses très légèrement les yeux. Est-ce que c’est un test ? Est-ce que c’est une mise en scène pour tester ta réaction ? Pourtant, la demoiselle ne semble pas démentir !

Dans le doute, tu préfères la jouer safe. Tu prends une grande inspiration pour regagner une expression neutre. C’est pas le moment de merder, Eden. Même si t’as de sérieux doutes sur la demoiselle, tu es face à une figure importante de la mafia. C’est ce pour quoi tu as travaillé d’arrache-pied toute ta vie.

-Miharu-chan, déclares-tu en posant ton regard déterminé sur elle, même si on peut sentir un soupçon d’hésitation dans tes gestes.

Tu t’inclines bien bas pour montrer les liens hiérarchiques qui sont en train de s’établir entre toi et la jeune fille, comme si tu la rencontrais pour la première fois.

-Les McCampbell sont des alliés fidèles des Vongola depuis des générations. Seulement ce lien s’est rompu avec la disparition de la précédente génération de gardiens. Je suis venue à Namimori pour rétablir ce lien.

Tu te redresses pour de nouveau faire face à ton interlocutrice. Sa voix, son expression…

Ce sont celles d’une tout autre personne.

L’aura de l’individu en face de toi t'arrache une expression surprise, tout comme ses paroles. Ce n’est pourtant pas étonnant. Si… elle (?) fait partie de la mafia, alors elle doit avoir un sacré paquet de renseignements sur toi. Le récent accord de ta famille et des McBeth en fait parti.

Tes pupilles se rétrécissent, alors que ton visage est éclairé par une lueur orangée. La flamme Ciel. Il se présente, et même si tu es plus grande, là, agenouillée sur ton coussin, tu te sens toute petite.


Tu te gourrais sur toute la ligne.

Cette personne a toute l’étoffe d’un leader.

Reprenant une expression sérieuse, tu l’écoutes attentivement, ton regard intense plongé dans le sien. Tout ton être te crie qu’un acte crucial de ta vie est en train de se jouer. Donc tu attends qu’il ait fini de parler sans en perdre une miette.

Le changement de ton te prend tout de même au dépourvu, même si tu n’en montres rien. De nouveau, il te semble retrouver la petite Yuri. Celle en laquelle tu doutais tant quelques minutes plus tôt. La sensation était vraiment étrange.

Tu hésites. Est-ce que c’est de bonne convenance d’aller te faire resservir ta boisson par un parrain ?
Mais est-ce également poli de refuser son offre ?

-J’accepterais un café avec plaisir, finis-tu par déclarer.

La pause que cette requête te permet de prendre est la bienvenue, car honnêtement, tu es sur le cul. Tu ne t’attendais absolument pas à ça. Tu lances un regard à Sora. Tu comprends un peu mieux d’où vient la confiance qu’il lui accorde. Impassible, tu te tournes de nouveau vers la porte par laquelle a disparu le parrain, ton cerveau tournant à plein régime.

...
Comme tu pouvais t’y attendre, le parrain des Nobusuma connaît les autres leaders des différentes familles. Tu as donc devant toi la route dorée pour arriver jusqu’au parrain des Vongolas.Tu réfléchis dors et déjà à ce que tu peux offrir pour obtenir ta place. Comme pour le lycée, tu as les moyens. Mais tu as aussi les compétences. Tu espères simplement que ton mentor acceptera de te former suffisamment vite pour que l’incident de la balle de dernière volonté ne se reproduise plus. Une demi-heure plus tôt, tu aurais eu parfaitement confiance en lui pour ça. Mais là, tu n’es plus sûre du tout. Tu te demandes même s’il n’a pas joué la comédie, ce matin.

...
Tu retiens également que le genre a changé.

Genderfluid, alors ?

...
Et quelque chose te fait tiquer aussi.
Le coup du « stupide mémo ».

Même si tu ne comprends pas vraiment pourquoi.

...
Mais surtout, elle… il… a déclaré qu’il avait envisagé de t’accepter dans sa famille, avant même que Sora ai suggéré l’idée. C’est donc un grand feu vert pour toi. Ce n’est pas l’idéal, techniquement. Ton objectif, celui de tes parents, ce sont les Vongolas. Ceci étant dit, ton mentor t’a expliqué la puissance des Nobusuma. Cet accord ne pourrait être que fructueux pour les McCampbell. Et puis, si cette personne est le maître du prochain parrain, alors c’est la meilleure personne à avoir dans ta poche. Rien ne t’empêchera de te rapprocher du parrain lui-même par la suite.

Pour l’heure, tu as donc tout intérêt à aller dans ce sens.
Ton interlocuteur de retour, tu le gratifies d’un signe respectueux de tête. Tu n’es plus la reine, la déléguée qui vient faire sa loi et asseoir son pouvoir. Non. Tu es un invité qui doit être reconnaissant envers son hôte.

-Merci beaucoup.

Tu portes le café brûlant à tes lèvres, avant de déposer doucement la tasse.

-Je te remercie de m’avoir éclairée un peu plus. Je sais que les choses sont en train de se mettre en place à Namimori. Je sais que le nouveau parrain est en train d’être formé, que beaucoup de sang a été versé, et qu’un criminel dont les motivations restent obscures se déplace librement dans la ville. En dehors de ça, mes connaissances de la situation sont limitées.

Tu jettes un bref regard à ton mentor pour guetter sa réaction, avec un air un brin accusateur qui luit dans tes yeux. Brièvement seulement, car tu finis par revenir aux prunelles roses en face de toi.  

-Mais je suis prête à écouter tout ce qu’il y a à savoir pour être éventuellement en mesure de vous aider.

Tu ne sais pas trop comment réagir à ce genre de déclarations.
En fait…
Tu n’as jamais eu à gérer ce genre de déclarations.
Enfin, si. Au lycée, quand tes amis jouent les lèches cul. « Eden-chan, tu es incroyable ! On peut vraiment te faire confiance. » Ça oui, tu as l’habitude de ce genre de déclaration. Généralement, tu revêt un sourire naïf et éclatant et répond « J’essaye juste de faire de mon mieux, mais ça me touche beaucoup ! Merci ! »

Mais là, ça te fait pas le même effet.
Est-ce que c’est parce que pour une fois, le compliment est sincère ?

Heureusement, tu n’as pas à donner de réponse, tu te contentes d’incliner légèrement la tête en signe de remerciements, tandis que les deux membres de la mafia discutent de ton sort.

Tu passes de l’incertitude, à la peine, et de la peine à une explosion compliquée de sentiment, tandis que tu entends les mots de ton maître avec les yeux grands ouverts.

De nouveau, ce qu’il te dit te touche profondément. Il fait moins l’effet d’une bombe, que ce matin. Il n’empêche qu’une fois encore, tu es assaillie par pleins de sentiments disparates que tu ne parviens même pas à identifier.

Bordel de merde, pourquoi ça doit faire si mal, et en même temps tellement de bien quand l’Arcobaleno te dis ce genre de chose ? Ce matin encore, il te faisait le coup, mais visiblement, ça ne lui suffisait pas. Dire que quelques minutes plus tôt, tu doutais encore de sa sincérité...
La vérité, c’est que tu n’as plus envie de douter. Douter, ce serait admettre que toutes ces déclarations pourraient être fausses. Et cette idée là te fais encore plus mal que le reste.

Du bonheur, du soulagement, de la fierté aussi.

Ça fait combien de temps que tu n’avais pas ressenti ce genre de chose ?

Mais bon, tu dois bien l’admettre. Tu as pas mal honte, aussi. Comme une ado dont sa mère vante les mérites à son crush. Sora est-il vraiment obligé de dire ce genre de choses face à ton futur supérieur ? L’embarras te saisit à la gorge au même titre que toutes ces émotions intenses dont tu te passerais bien. Aussi, alors que tu sens le petit être grimper sur ton épaule et arranger une de tes mèches, tu détournes le regard. Est-ce un soupçon de rouge sous ton fond de teint ?

Heureusement pour toi, ton interlocutaire revient sur le sujet initial. La question te fais légèrement tiquer. Déjà, il est passé au vouvoiement. Et ensuite… Qu’entends-t-il par « ce que tu veux pour le futur » ? Il n’est pas question de ce que toi tu veux, mais de ce qui est le mieux pour ta famille. C’est ce pourquoi tu es là, après tout.

-Les McCampbell fournissaient les Vongolas avec des costards et des pièces d’une qualité inégalée. Ils avaient également travaillé de pair avec les ingénieurs de la famille afin de concevoir des tissus  résistants en cas de confrontation et d’assauts, et ce en échange de la protection de la mafia. J’aimerais bien mettre de nouveau en place ce genre d’accord, et il peut tout à fait commencer avec la famille Nobusuma. Je pense qu’il y aurait matière à allier la culture nipponne et occidentale, afin de mettre l’emphase visuelle sur ces traditions qui semblent chères à votre famille, mais que vous semblaient également vouloir faire évoluer.

Des détails, de l’ordre du brainstorming. Mais c’était le genre de détail qu’il te semblait important de préciser. Déjà, pour montrer que tu avais compris les valeurs de la famille Nobosuma, mais également que tu avais dors et déjà des choses à apporter.

-De plus, je pense qu’il y aurait matière à pousser les recherches plus loin, et concevoir des tenues résistantes adaptées aux balles de dernières volontés.

Depuis ta petite « crise d’ado enflammée » ce problème est presque devenu personnel.

-De même, sous couvert qu’ils bénéficient des résultats desdites recherches, les McCampbell pourraient bien donner un coup de pouce matériel et financier aux équipes scientifiques des Nobusuma.

Bien droite, avec une diction parfaite, comme tu l’as toujours appris. Tu es la digne héritière de l’empire qui t’attends.

-Enfin, ce ne sont que des détails. De manière générale, j’aimerais aider à la croissance mutuelle de la marque McCampbell et de la mafia Japonaise. Je peux, pour cela, me placer en interlocutrice privilégiée entre vous et des figures d’Angleterre, mais pas seulement. Les connaissances de ma famille s’étendent à travers le monde.