..... Quarante ??
Je ne me souviens pas de club de lycée qui ait un jour compté autant de membres. Il y a autant de musiciens dans leur bande ?? Non... Peut-être qu'il y a eu un quiproquo.

Je confirme : il y a eu un quiproquo. Mais ça reste tout de même pas mal, quarante membres de sa famille encore en vie, et de ce que je comprends, majoritairement concentrés à Namimori ! Par contre, ça doit être quelque chose, les repas de famille. Ils ont de la place pour accueillir tout le monde ? Barf, ça m'regarde pas après tout !

... D'accord, quatre ! Ça fait un peu moins "peur", ça, haha.
Je notai le nom de Shawn dans un coin de ma tête. Comme le monde est petit, il n'est pas impossible que je tombe un jour sur lui, et si ce môme dit qu'il est bon en musique, je veux bien le croire. Ça serait toujours une rencontre intéressante.

Sa question venue de presque nulle part me fit réfléchir trois secondes avant que je ne rigole doucement :

- Suffisamment bonne pour enseigner, j'imagine. J'fais de la capoeira et du bo-jutsu, avec une touche de hip-hop en autodidacte. Replaçant une mèche de cheveux derrière mon oreille.

J'étais fière de ce que je faisais, mais pas forcément orgueilleuse. J'étais juste heureuse de pouvoir m'éclater dans chacune de mes passions sans personne pour m'emmerder, et même mieux : les partager à d'autres.

- Si t'as le temps et l'envie entre l'apprentissage de deux nouveaux instruments, n'hésite pas à venir toquer à ma porte, tu seras toujours le bienvenu. Petit clin d'œil.

I dunno petit gars, c'est à toi de me le dire ! Je n'avais aucune idée de quels instruments il avait expérimentés jusqu'ici, ni ceux qu'il expérimentait actuellement. La suite tourna mon léger sourire nonchalant en pouffement. Pouffement qui tourna en léger rire bien franc à l'attitude décomplexée du bonhomme. Ça, c'est un gens comme je les aime !

- Bah écoute, j'espère que t'en tireras autant de plaisir que sous la couette ~ Clin d'œil à la limite du salace, mais sincère.

Eyyy, j'étais contente que mes cours le tentent ! J'espérai qu'il ne s'enfuirait pas dès la première leçon tho. Je l'aime bien ce Nayaka !

- T'as déjà des affinités avec un sport en particulier sinon ? Je peux voir pour adapter mon enseignement en fonction.

Non parce que je me souvenais bien des leçons que Kaiji me donnait, à me balancer des ballons à la gueule que je devais parer, renvoyer ou dégommer avec mon bâton, avec ou sans flamme. Ou encore des exercices où je devais rattraper des anneaux de différentes tailles sur une partie précise de mon bō et j'en passe. Ces exercices étaient censés être des sortes de "respirations" dans l'apprentissage plus brut du bō-jutsu, mais c'étaient certainement les plus crevants. J'adorais, hein ! Ça changeait des apprentissages plus classiques et rébarbatifs, et j'acquérais non seulement la maîtrise de mon corps mais aussi celle de mon arme. Mais... Je me souvenais aussi des bleus que je me prenais, des pénalités à me taper des pompes par cinquantaines au minimum ainsi que des courbatures aux neurones. Oui, aux neurones, je vous jure que c'est possible !
Tout ça pour dire que, oui, avec Kaiji j'avais appris l'art du bō, mais aussi à varier les méthodes d'apprentissage.

Aaah, pas un habitué du sport, donc. Et pas forcément un fana non plus. C'est pas grave, c'est mon rôle de lui apprendre à aimer suer et avoir des courbatures de partout ! Déjà, s'il me demande de participer à mes cours, c'est qu'il doit bien y avoir quelque motivation à embraser sous son crâne de surdoué de la musique !

J'enregistrai soigneusement ce qu'il me dit. Donc en gros, ce qu'il me raconte, c'est qu'il est capable de se bagarrer mais que la maîtrise de soi c'est pas trop son fort. Bref, quelque chose de parfaitement possible à améliorer ! et la tempête en moi sait très bien de quoi je cause. Ce gamin a du potentiel - ils en ont tous. J'ai hâte de l'aider à ce qu'il s'en approprie et en fasse quelque chose de badass - cette pulsion n'est pas nouvelle chez moi.
Je rigolai à mon tour.

- Warf... C'pas grave ! Pour le sport, je veux dire. Ahem. Par contre je ne vais pas te cacher que tu risques de morfler au début... M'enfin, je pense que si t'es assez motivé, tu seras tellement satisfait du résultat que t'en redemanderas encore.

Comment ça on dirait un discours de maso ? C'est faux, c'est juste ma façon de le mettre au défi ! Si je cerne bien son caractère, ça pourrait la jouer à la positive pour les cours à venir. Je lui souriais d'un air un peu taquin, je l'aimais bien.
Je fis une légère pirouette sur moi-même, je me sentais l'envie de danser à force de rester de trop immobile.

- Je fais cours à peu près toute la semaine, et je peux m'adapter pour les cours particuliers. Pour guise de warning : j'aime bien demander l'impossible à mes élèves pour savoir ce qu'ils valent. Toujours partant ? S'il voulait reculer en connaissance de cause, c'était maintenant.

Je pris ses mains, sans ciller ni détourner mon regard du sien.

- Ne t'inquiètes pas. Mon père est musicien, et je suis musicienne aussi. Je te comprends. J'adapterai mes cours, même si en soi ni tes mains ni tes oreilles ne risquent grand-chose avec moi.

Je les lâchai avec un pas un peu dansant sur place.

- Après, si tu dois te battre prochainement, attend-toi à te faire blesser un peu n'importe où. Tu ne peux pas toujours prévoir où l'ennemi va frapper. Je vais t'apprendre comment te préserver et riposter au mieux, mais se lancer dans un combat est aussi accepter l'idée qu'on puisse y perdre quelque chose.

Je ne le lâchais pas du regard, très calme et compréhensive, déjà dans une optique de pédagogie. Mais j'étais sérieuse.

- Mais je pense que si tu as en tête de te lancer dedans, c'est aussi que ce qu'il y a à y gagner ou que la cause que tu y portes sont importants. Aie juste conscience de cela.

La grande différence entre les petites frappes qui cognent tous ceux qui les regardent mal et les combattants, c'est que ces derniers ont justement conscience de ce fait. Je suis là pour aider des combattants à naître - pas pour lancer d'autres mauvaises graines sur la piste. À celles là, je leur souhaite de retrouver le bon chemin, mais je ne participerai pas à leur prolifération.

Je ris à son affirmation. Loin d'être un jugement, cela était une vague supplémentaire de motivation. Sauver le monde ! Mais bien sûr que j'en suis !

- Pour sauver le monde ? Mais toujours !

Je ne savais pas ce à quoi il se référait mais mon vieil instinct de combattante me disait que ça annonçait de l'action. Et moi, je vis pour l'action. Je regarde Arun de biais, toujours toute sourire.

- Est-ce que tu comptes me mettre dans la confidence de tes plans ou il faut attendre encore quelques épisodes ? Je suis sur le ton de la blague mais mon côté curieux ne pouvait pas s'empêcher d'espérer qu'il glisse une ou deux informations. Même si j'en doutais. C'est cachottier les ados.