Aujourd'hui était censée être une journée des plus normales.

Réveillée au petit matin, Megumi se sentait sereine et impatiente à la fois. Dans deux semaines commenceraient les cours. Une nouvelle aventure allait commencer pour elle, et elle avait réellement hâte qu'elle commence. Cela ne devait toutefois pas la détourner de ses tâches et chaque jours qui passait devenait toujours un peu plus difficile. En soit, tout ceci n'était que des petites erreurs à droite à gauche, mais le temple était réellement sévère. Elles s'accumulaient et devenaient très révélatrice de l'humeur de la jeune fille. Alors ils devenaient toujours un peu plus durs avec elle. Cela ne l'aidait pas, en soit, car ça augmentait ses erreurs. Enfin, un stupide cercle vicieux, tout ça à cause d'une réaction normale d'une adolescente de son âge. Avaient-ils tous oublié qu'ils avaient été jeune à un moment donné ?

Après une efficace scéance d'étirement, la demoiselle s'en était partie se laver. Elle était censé s'occuper de toute la partie publique aujourd'hui, alors elle allait devoir être impeccable. Elle adorait ces jours, car c'était d'autres personnes qui s'occupait de sa coiffure et de son maquillage. Malgré le sérieux de ces moments, elle pouvait se détendre, se sachant entre de bonnes mains. Ce ne serait pas sa faute si son maquillage n'était pas parfait. Bon, en soit, elle ne blâmait jamais personne et faisait forcément attention que personne ne se fasse blâmer. Ce n'était jamais vraiment quelque chose d'agréable, en soit. Maaais il y avait toujours cette petite satisfaction de se dire que, cette fois, elle n'y était pour rien.

La matinée s'était écoulée sans accroc. Les visiteurs avaient été adorable, autant les habitués que les touristes. Toutes les bénédictions avaient été données, et un mariage était visiblement en train de se préparer dans un autre côté du temple. Du peu qu'elle en avait comprit, ce serait dans un ou deux mois, les mariés étaient juste très précautionneux. Elle appréciait cela, cela voulait dire qu'une carpe serait offerte et c'était sa tradrition préférée. Elle put prendre une pause à midi et se reposer un peu. Assise au bord de l'eau, le dos au bâtiment, le temps doux et frais à la fois, le clapotis des carpes dans l'étang... Elle inspira  grandement, prise d'une forte émotion de joie. C'était des moments très simples et habituels, voir quotidiens. Et pourtant, cette sensation de sérénité était toujours présente. Cette joie de ce calme, du repos. Il faudrait vraiment une terrible nouvelle pour tout ruiner.

Tandis qu'elle avalait doucement un thé genmaicha, elle entendit du raffut derrière elle. Megumi se retourna doucement et put voir les ombres derrières les murs fins. Quelque chose était en train de se passer. Heureusement, elle se doutait que ce n'était rien de grave, que c'était plus du mouvement de surprise. Un évènement de dernier moment. D'ailleurs, même pas 10 secondes plus et sa mère apparut à la porte. La refermant derrière elle, elle alla s'asseoir en face de sa fille qui lui avait sourit avec joie et curiosité.

-Bonjour Mère. Comment vas-tu ?

-Très bien, merci ; répondit sa mère tout en se servant aussi de la boisson chaude. Megumi savait que sa mère allait lui expliquer ce qu'il se passait, mais chaque chose en son temps. Megumi, je vais devoir te demander de changer tes plans pour aujourd'hui. Nous avons des invités importants qui viennent de loin et qui un besoin d'un toit au dessus de leur tête le temps de se trouver un lieu à eux. Les prêtres sont en train de préparer les chambres, je te demanderais donc de servir d'hôte lorsqu'ils arriveront.

-... Ce sera fait, Mère.

L'apprentie prêtresse était un peu étonné par cette demande. En effet, la plupart du temps, c'était justement sa mère qui s'occupait de ce genre de situation. Les invités qui avaient droits aux chambres étaient en général très importants et Momoka s'assurait toujours que tout soit parfait. Puis elle comprit. Elle sourit grandement, heureuse de pouvoir montrer ce qu'elle savait faire. Elle allait bientôt vivre en dehors du Temple, en toute indépendance et elle allait devoir apprendre à se débrouiller socialement. Quoi de mieux pour mettre en pratique ce qu'elle avait apprit que des invités surprises ?

Durant la suite de la conversation, elle apprit qu'ils venaient d'un autre Temple, en Nagano, sur le Mont Hotaka. Ils venaient donc vraiment de loin, et c'était la mission de Megumi des les aider à s'habituer à la folle ville qu'était Namimori. Elle l'accepta sous le regard bienveillant de sa mère et finit rapidement son repas. Elle se devait de changer de tenue et porter quelque chose d'un peu plus présentable. Aujourd'hui, c'était du sérieux. Au fond, elle était surexcitée. Elle aimait les épreuves et elle savait qu'elle allait pouvoir prouver à quel point elle pouvait se débrouiller.

Jusqu'à l'arrivée des invités, elle s'était concentré sur la calligraphie, qui l'aidait beaucoup à se concentrer et se recentrer. Elle avait ainsi pu finir un poème qu'elle avait commencé la semaine précédente. Lorsque leur arrivée fut annoncée, elle se releva, vérifia qu'elle était encore présentable et s'avança dans les couloirs. Pour éviter de se mettre à courir, elle compta ses pas en rythme, fredonnant discrètement une contine. Il y en avait une pour toute situation, et elle savait laquelle l'aiderait. Elle prit une très grande inspiration en approchant la salle d'attente. Sans manquer un temps, elle ouvrit la porte et entra d'un pas. Là elle s'arrêta, souriant doucement/poliment, allez savoir. Elle s'inclina très respectueusement devant eux et les regarda avec la douceur dont elle avait vu sa mère se munir.

-Bonjour. J'espère que vous avez fait bon voyage. Je me nomme Megumi Endo ;Elle se réinclina; et c'est moi qui m'occuperais de vous aujourd'hui. Les autres prêtres vont venir s'occuper de vos affaires, si cela n'est pas déjà fait. Permettez-moi de vous faire le tour du Temple.

Quelle première rencontre. Megumi avait l'habitude du sérieux des prêtres de son temple. Il est vrai qu'à force de les côtoyer, ils avaient fini par s'adoucir à ses côtés et était un peu plus chaleureux. Comme c'était étrange de retrouver ce vrai sérieux, ce vrai désir d'être parfait et méticuleux sans une once de familiarité. Mais ce ne fut pas quelque chose qui la perturba plus que cela. Elle comprit aussi immédiatement pourquoi ils étaient tout les deux ainsi. Ce n'était pas juste une question de respect. Il y avait un véritable rôle important. Héritier d'un clan, ce n'était pas rien. Elle se devait vraiment de faire de son mieux face à eux.

Mais rien ne pouvait l'empêcher de sourire. Et elle savait sourire en toute situation, même dans un cas comme celui-ci. Un sourire doux, chaleureux mais sérieux. Ce n'était pas quelque chose que sa mère ferait, toutefois. Elle le savait. Ce qui ne la retenait pas de le faire. Après tout, ce temple ne prônait-il pas les relations ? Certains débattraient sûrement sur le fait qu'il fallait respecter de façon grave. Elle était loin d'être d'accord et préférait montrer ce côté encore jeune de son esprit. Après tout, elle n'avait que 16 ans ! Rien ne l'enchaînerait dans le trop sérieux si ce n'est elle-même.
Avec un hochement de tête, elle fit signe de la suivre.

-Je vais vous faire visiter les quartiers un peu plus privé d'abord, puis le temple après. Il y a encore beaucoup de monde en ce moment, et je ne pense pas que cela doit être agréable d'être au milieu du monde lorsqu'on souhaite juste mieux connaître les lieux.

Elle s'exécuta immédiatement. Récitant des poèmes dans sa tête, elle avait prit le pas habituel du prêtre. Un rythme bien équilibré, ni trop rapide pour profiter du paysage, ni trop lent pour ne pas paraître ennuyant. Suivant les couloirs, elle leur montra d'abord une salle cérémoniale qui n'était louable que pour les mariages ou funérailles, cela dépendait des fois. C'était un endroit très simple, avec des bancs bien alignés. Il n'y avait pas d'idole sur l'autel, car ils tenaient tout type de mariage, peu importe la religion. Tous symboles étaient rangés dans un coffre juste en-dessous de l'autel, mais il n'était pas nécessaire de le montrer. Il était facile de deviner que cette salle était pour des évènements très privés car il y avait des portes pour y entrer.

Elle profita de faire un petit détour vers les différents étangs. Les passerelles passant au-dessus de l'eau étaient faites de pierres et non de bois, pour éviter tous risques de pourrissement ou d'affaissement. Il n'y avait pas de carpes dans les étangs connectés au lac principal. Elle leur expliqua rapidement que c'était dû à des réglementations environnementales, avant de leur montrer l'endroit où elles se trouvaient. Elle s'arrêta quelques instants devant le spectacle doux de ces animaux semblants si serein. Toujours avec sa douceur habituelle, elle leur proposa de participer aux heures dédiées pour les nourrir, qui était soit tôt le matin, soit tard le soir. Ils leur arrivaient rarement de le faire en plein milieu de journée, mais à nouveau, c'était en général pour des festivités.

Enfin, la partie habitation. Cela se voyait assez facilement. En effet, tout n'était pas de bois ou de peinture traditionnelle. La cuisine principale, par exemple, était très moderne, toujours dans l'ambiance du lieu. Elle leur informa qu'en plus de nourrir les prêtres, ils préparaient aussi des offrandes eux-mêmes et des gâteaux pour le publique, il leur fallait donc le plus de capacités possible. De même pour les salles d'eau et les chambres. La bibliothèque privée gardait toutefois un style réellement shintoïste. Elle était fermée à clef qu'il faudrait demander à un prêtre s’ils souhaitaient s'y rendre. En passant devant, elle leur avait montré leurs chambres. Bien que cela soit incertain, ils avaient choisi de les séparer, leur donnant vraiment leur zone privée.

Après tout ceci, le petit groupe pu retourner aux lieux publics qu'ils avaient sûrement plus ou moins vu au début. Ce fut d'ailleurs un peu plus rapide à montrer. Il y avait plusieurs salles de cérémonies pour les différentes fêtes, une autre juste pour la cérémonie du thé. Le lieu de prière était proche des étangs, tandis que celui des offrandes était un peu plus au sec pour éviter tout accidents. Comme prévu, l'endroit était déjà un peu plus vide de visiteurs qu'à leur arrivée. Il était très rare que le temple soit rempli toute la journée, il y en avait d'autres biens plus populaires que le leur. Il y avait aussi de petits jardins, qui étaient plus là pour la décoration que pour une réelle raison spirituelle. A nouveau, Megumi leur présenta tout les horaires des cérémonies quotidiennes. Elle ignorait toutefois ce que sa mère souhaitait faire d'eux. Allaient-ils participer activement à la vie du temple ou paieraient-ils seulement leur séjour ? Elle ne partagea pas sa réflexion, elle ne souhaitait pas les déranger là-dessus.

Enfin, elle retourna devant la porte de la salle d'attente, la visite terminée. Elle s'inclina très bas. Elle avait fait attention à rester bien en rythme tout du long, à répondre à toutes leurs questions s'ils en avaient eu. Elle ne le montrait pas, mais elle était assez fatiguée. Elle l'aurait sûrement moins été si elle n'avait pas participé, en début de journée, aux réceptions publiques. Quand elle se redressa, elle avait toujours son sourire, renouvelé.

-J'espère que vous vous sentirez bien durant votre séjour ici. Le repas du soir devrait bientôt être fait. Vous avez le temps, si vous souhaitez, de vous familiariser avec le lieu ou vous reposez. On viendra vous chercher de toutes manières.

Elle inclina encore la tête et attendit leur réponse, un peu impatiente de retourner dans sa chambre pour prendre un peu de repos.

Le calme et le sérieux des invités avaient énormément impressionné les prêtres du temple, qui se sont plus ou moins automatiquement mit à leur niveau de sérieux. Une forme de fierté masculine qui ne ressortait réellement que chez eux et qui gênait très légèrement Megumi. Bien qu'elle comprenne l'envie de vouloir bien faire, le niveau d'ego était assez haut. Elle n'arrivait pas à savoir quelle partie les poussait le plus à le faire. Certains étaient évidemment très honnêtes, mais d'autres... Cela mettait tout le temple dans une atmosphère qui lui semblait bien étrange.

Avec minutie, elle avait répondu à toutes les questions et elle avait aussi bien évidemment accepté d'aider Aoi à s'adapter à cette nouvelle cuisine. Cette demande avait enflammé la curiosité de Megumi. Est-ce que leurs lieux sacrés étaient si différents que ça ? Elle avait une soudaine envie d'aller visiter cet endroit inconnu. Elle pourrait bien sûr leur demander, mais plus tard. Il y avait toujours un lieu et temps pour ce genre de demande. Elle espérait que l'endroit était ouvert aux femmes. Elle savait que, selon la région, ce n'était pas le cas. C'était assez embêtant mais elle se doutait que, petit à petit, ça serait plus largement accepté.

A la fin de la visite, et à la demande de l'oncle, elle alla retrouver sa mère. Elle était dans la bibliothèque, en train de lire des archives. Peut-être était-ce des textes sur la famille Hisui ? A moins que ce soit un sujet tout à fait différent. Dans les deux cas, elle n'avait pas le droit de laisser sa curiosité prendre le dessus. Elle l'approcha et lui annonça que l'Oncle souhaitait lui parler en privée. Refermant le parchemin, Momoka la remercia et alla s'entretenir avec Hisui Harushige. La demoiselle sortit juste derrière elle, fermant à clef le lieu d'étude. Elle alla ranger la clef dans la boîte habituelle et croisa l'un des prêtres les plus importants. Il lui indiqua qu'à la demande de sa mère, la famille Endo et Hisui mangerait en privé. De ce fait, les autres prêtres iraient manger d'abord pour leur laisser tout le temps nécessaire après. Megumi appréciait le geste, mais elle doutait fortement que le repas durerait aussi longtemps qu'ils ne le pensaient.

Elle retourna donc vers sa chambre pour se reposer un peu en lisant un de ses mangas préférés. Elle avait beaucoup de chance aujourd'hui, à part une visite approfondie du Temple, elle avait pu faire ce qu'elle souhaitait aujourd'hui ! S'allongeant sur son lit, elle continua sa lecture. Elle en était aux trois-quarts du tome qu'elle tenait entre les mains, et elle lisait vite. Elle savait qu'il ne lui faudrait pas longtemps pour le finir. Et ce fut le cas. S'étirant pour dégager les émotions du moment, elle se dirigea vers sa petite bibliothèque pour prendre le prochain tome... Pour se rendre compte qu'il n'était pas là. Elle avait vérifié partout dans sa chambre, mais il était introuvable. Cela la paniqua légèrement. Elle savait qu'elle avait acheté le tome un peu plus tôt dans le mois, alors où était-il ?

Elle ressortit de sa chambre pour aller le chercher dans l'habitat. Elle évita évidemment la salle à manger qui était pleine, et aussi parce que c'était un des lieux les moins probable pour son manga, tout comme la cuisine. Les prêtres savaient pertinemment à qui appartenait ce genre de bouquin et ils lui auraient rendu immédiatement. Alors elle chercha plutôt dans les petites salles un peu plus secrètes. Nul part. Elle doutait fortement que quelqu'un d'autre l'avait ramené dans leur chambre, ce n'était pas tout à fait le genre d'histoire qu'ils appréciaient. Peut-être les chambres d'amis...? Elle alla vérifier celles qui étaient libres, mais rien non plus. En sortant de la dernière, elle entendit un instrument. En s'approchant, elle reconnu la chambre qui avait été donné à Aoi. C'était vraiment très beau. Elle ne s'était pas du tout rendu compte qu'il avait amené son Qin ici. Enfin, normal, elle n'avait pas déplacé les bagages non plus. Elle sourit doucement et allait s'éloigner quand elle se souvint de pourquoi elle était ici. Une sueur froide glissa lentement le long de son dos. Oh non. Est-ce que son tome était dans la chambre d'Aoi..? Il n'y avait qu'un moyen de le savoir, mais elle ne voulait vraiment pas le faire. Il semblait si concentré... Attendre après le repas ? Oh non, ça serait trop gênant. Mais si elle le faisait maintenant, est-ce que ça ne ferait pas d'elle un mauvais hôte ? Elle se tapa doucement sur les joues. Non, c'est bon. Ce n'est pas grave, tu n'es pas censé être parfaite dès le début. De plus, c'était quelqu'un de ton âge, il ne serait pas aussi stricte que son aîné, non... ?

Elle souffla, prit son courage à deux mains et toqua doucement à la porte. Elle allait laisser Aoi l'ouvrir, mais par politesse, elle s'annonça déjà.

-Hisui Aoi ? C'est Endo Megumi... désolée de vous déranger, est-ce que je peux entrer... ? Je crains d'avoir oublié quelque chose dans votre chambre.

Elle gardait son sérieux et son calme, mais on pouvait sentir dans son regard la gêne de sa demande. Elle souriait même doucement. Plus ou moins.

Un énorme soulagement traversa le corps de Megumi quand elle vit Aoi lui montrer ce qu'elle cherchait. D'une certaine manière, elle se doutait que l'Oncle n'aurait pas réellement apprécié voir ce genre de livre traîner. D'ailleurs, elle ignorait totalement comment il s'était retrouvé là. Elle avait beau y réfléchir, elle était confuse. Elle doutait fortement que ce soit l'un des prêtres. Quoique... On ne sait jamais, peut-être que l'un d'entre eux s'était mis à lire par pur curiosité. Elle aurait préféré qu'il lui dise directement plutôt qu'essayer de se cacher. Surtout s’il ne rangeait pas après ! Enfin, ce n'était qu'une supposition sorti tout droit de la tête d'une adolescente un peu imaginative. Elle souri doucement à Aoi quand il lui posa une question tout à fait légitime.

"Ah, c'est un Shôjo. C'est une histoire sur des jeunes filles qui doivent protéger le monde grâce à des capacités que l'on pourrait dire de... magique. Ce n'est pas quelque chose d'incroyable, mais ça détend beaucoup. Désolée du dérangement."

Avec sa douceur habituelle, Megumi reprit le tome et jeta vite fait un coup d'œil à la couverture. Hm... Ok, elle avait peut-être oublié de mentionner le côté un peu plus sexy et surtout très... homosexuel, de l'histoire. Toutefois, il n'avait pas l'air gêné, donc il ne l'avait sûrement pas lu ! Enfin. Elle l'espérait fortement. Elle n'était pas sûre de pouvoir dire avec certitude ce que pensait Aoi. Il était un peu difficile à déchiffrer. Etait-ce à cause de son éducation, du fait qu'il a vécu pendant un long moment dans un lieu reculé, ou tout autre chose ? Oh, peut-être un mix de tout cela. En tenant le petit manga contre elle, elle s'inclina légèrement pour le remercier. Elle le regarda à nouveau, ayant très légèrement aperçu l'instrument qu'il jouait juste avant. Ah ! Cela lui rappela quelque chose qu'elle souhaitait lui demander.

"Si je peux me permettre... Je trouve que vous jouez merveilleusement bien. Et, si vous êtes d'accord, je souhaiterais jouer avec vous un jour, avec mon Shakuhachi ou Shinobue. Nous connaissons sûrement les même contes et chants, et même si ce n'est pas le cas, autant apprendre."

Elle se ré-inclina légèrement après sa phrase, retenant une forme d'excitation. Il y avait toujours plein de différence entre les temples, et elle souhaitait réellement apprendre plus. Chaque différences étaient quelques choses d'enrichissant et elle était loin de les rejeter. Même une simple note différente, ou un tempo plus rapide, pouvait raconter plein de chose. La petite demoiselle était assez heureuse de la situation. Elle avait eu peur de devoir rencontrer des personnes totalement rustres, et bien que ce soit elle qui ait parlé... Elle pouvait sentir une autre forme de chaleur en son interlocuteur. Il était bien présent dans la réalité. Bon, ok, elle déduisait encore plein de chose à partir de rien. Mais elle savait faire confiance en son intuition. Et elle se sentait bien aux côtés d'Aoi.

Megumi cligna légèrement des yeux en attendant une éventuelle réponse, quelle qu'elle soit. Même un "je vais y réfléchir" lui allait très bien ! Certes, elle serait un peu triste si la réponse devrait être un non, mais cela ne l'étonnerait pas plus que cela. Après tout, elle était la première à connaître ce que c'était que d'avoir un emploi du temps assez chargé. Ce qui lui rappela qu'elle devrait sûrement aussi regarder à quel moment elle-même serait libre pour jouer.

Il existe des théories comme quoi, si personne ne dit quoi que ce soit pendant 5 secondes, ce temps-ci écoulé, la conversation est difficile, voir impossible à reprendre. Ce qui était à moitié vrai. La plupart des personnes se contente seulement de cette phrase sans chercher à comprendre le contexte autour de cette théorie. Et il se trouve que cela concerne surtout les conversations avec des personnes qu'on ne connaitrait pas ou avec qui une conversation plus approfondie semble impossible.

Bien qu'ils soient encore étranger l'un à l'autre, Megumi ne sentait pas cette gêne envers Aoi. Bien évidemment, il y a une certaine base entre les deux, dont le fait d'avoir tout les deux vécus dans des temples et avoir eu une éducation plutôt stricte. Mais même si elle ignorait ce fait, elle se doutait que la situation resterait la même. Il faudrait réellement avoir peur du silence pour être embêté par celui-ci. Elle avait une certaine aisance avec le jeune homme qui lui faisait face. Elle appréciait même ce côté un peu plus posé et réfléchit qu'il avait. Sans aucun doute, il avait pensait chaque mot et tous étaient précieux. Alors, même si le visage était impossible, ces deux petits mots la remplir d'une joie qu'elle eut du mal à retenir et ressortit par un sourire candide. Elle s'inclina à nouveau.

"Merci beaucoup ! Je vous laisse tranquille désormais, désolée de vous avoir dérangé."

Et avec les dernières salutations de politesse adéquates, elle était repartie dans sa chambre. Elle se sentait vraiment d'humeur joyeuse désormais ! Tellement qu'en arrivant dans sa chambre, au lieu de livre son manga immédiatement, elle alla plutôt chercher ses instruments. Son Shinobue était dans sa chambre. Elle se rappelait que c'était l'un des premiers qu'elle avait apprit. C'était assez normal, bien que joué par tout le monde, il était parfois vu comme un peu plus féminin. Son Shakuhachi, au contraire, avait été un peu plus étonnant. Déjà, la façon de faire résonner les notes étaient extrêmement différent et bien plus complexe que d'autres instruments. Ensuite, au vu de sa taille, il était plus souvent joué par la gente masculine. Ce n'était pas rare de voir une femme en jouer, mais ce n'était pas courant non plus ! Elle alla le chercher dans la salle où étaient rangés tous les autres instruments. Elle avait réussit à demander à avoir le sien et pas celui du temple. Il n'était pas tellement différent d'un point de vue extérieur, mais il était déjà un peu plus adapté pour elle. Elle l'admira pendant quelques secondes avant de le ramener et le dépoussiérer. Elle avait une soudaine envie d'en jouer sur l'instant, mais elle ne souhaitait pas déranger les autres. Elle le reposa donc à côté de son Shinobue.

Megumi s'assit sur son lit en inspirant grandement. L'arrivé des deux membres de la famille Hisui... La rentrée des classes à Namimori... Tellement de chose qui changeait dans son petit quotidien. Et elle le sentait au fond d'elle, ce n'était que le début. Elle sourit pour elle-même, prenant le temps de réfléchir à ce qu'il se passait. Elle s'était presque automatiquement mise à méditer sur place et sursauta lorsqu'on vint lui rappeler que c'était bientôt l'heure du repas pour eux. Regardant sa montre, elle remarqua qu'elle n'avait absolument pas vu le temps passer ! Elle se releva en s'étirant et se dirigea vers la cuisine, tranquillement. Elle se doutait que la conversation ne serait pas des plus intéressantes. Mais elle sentait une nouvelle énergie en elle. Quelque chose qui lui rappelait un bon opening d'anime, ou un vrai début d'aventure. Ca y est. Tout commençait vraiment pour elle.